Document individuel erroné = engagement unilatéral dans le chef de l’employeur ?

Ressources juridiques

Caroline Huart, Avocate, Claeys & Engels

Dans un jugement du 14 janvier 2022, le Tribunal du travail de Liège se prononce (entre autres) sur la portée à donner à un document individuel (émanant de l’employeur) contenant des informations erronées, incompatibles avec les dispositions du règlement de l’assurance de groupe. L’occasion pour le Tribunal de rappeler les conditions d’existence d’un engagement unilatéral.  

Les faits

La travailleuse était occupée auprès de son employeur depuis le 1er mai 2007. Ce contrat de travail prévoyait notamment l’affiliation du travailleur à une assurance de groupe.

Le 28 septembre 2021, la travailleuse notifie sa démission moyennant la prestation d’un délai de préavis.

La travailleuse contestait plusieurs aspects financiers de son occupations professionnelle. Elle introduit une procédure judiciaire mais est finalement déboutée.

La demande relative à l’assurance de groupe

Dans le cadre du présent article, nous nous intéressons à une demande annexe formulée par la travailleuse et qui concernait le pourcentage des primes devant être versées dans l’assurance de groupe dont elle bénéficiait.

La travailleuse réclamait un complément aux primes versées dans cette assurance de groupe dès lors qu’elle considérait que le pourcentage de primes qui avait été appliqué (4,86%) était inférieur à ce à quoi elle avait droit (6,5%).

Cette réclamation se fondait sur un document individuel d’information que l’employeur avait communiqué à la travailleuse en 2011 et qui mentionnait « assurance groupe 6,5% Rémunération annuelle ». La travailleuse demandait donc à ce que soit appliqué un taux de prime de 6,5% en lieu et place du taux de 4,86% qui avait été appliqué par l’employeur : selon la travailleuse, ce document individuel était constitutif, dans le chef de l’employeur, d’un engagement unilatéral (non respecté) de lui faire bénéficier de primes à l’assurance de groupe correspondant à 6,5% de sa rémunération annuelle.

L’employeur soutenait, quant à lui, que ce document individuel d’information était entaché d’une erreur matérielle, unique raison pour laquelle il renseignait ce taux de 6,5% et qu’aucun engagement unilatéral ne pouvait, partant, en être déduit. Pour le surplus, l’employeur renvoyait au règlement de l’assurance de groupe (auquel le contrat de travail de la travailleuse faisait expressément référence) qui prévoyait bien le taux appliqué de 4,86%.  

Le jugement du Tribunal du travail de Liège

Le Tribunal du travail considère, en l’espèce, que le document individuel n’est pas suffisant pour en déduire un engagement unilatéral, dans le chef de l’employeur, de verser des primes correspondant à 6,5% de la rémunération annuelle de la travailleuse dans l’assurance de groupe.

Le Tribunal en profite pour rappeler que « un engagement unilatéral ne peut être source d’obligations que pour autant que son auteur ait manifesté son intention de s’engager de façon suffisamment certaine et extériorisée ».

L’occasion également pour le Tribunal de rappeler qu’une assurance de groupe présente un caractère collectif et doit, par conséquent, être appliquée de la même manière à toute la population affiliée. Sur cette base, le Tribunal constate que dès lors que le règlement de l’assurance de groupe prévoit expressément un taux de 4,86%, il ne pourrait être raisonnablement considéré que le document individuel d’information datant de 2011 démontre la volonté de l’employeur d’octroyer des primes à un taux de 6,5%. Ceci, d’autant plus que les données reprises dans les fiches de pension que la travailleuse recevait annuellement faisaient, elles, bien référence à des primes de 4,86%.

Le Tribunal constate, du reste, que le document individuel reprenant le pourcentage de prime erroné était communiqué par l’employeur dans le cadre de la procédure judiciaire et que la travailleuse admettait ne pas en avoir eu connaissance avant la procédure. La travailleuse n’avait donc, auparavant, jamais réclamé un pourcentage de prime plus élevé que celui appliqué par l’employeur.

Pour toutes ces raisons, le Tribunal déboute la travailleuse de sa demande tendant au paiement d’un complément de primes à l’assurance de groupe.

Conclusion

Par ce jugement, le Tribunal du travail de Liège vient réaffirmer le principe de primauté du règlement d’assurance de groupe : le règlement est la seule source de droits dans le cadre de l’assurance de groupe et il ne peut être tiré aucun droit d’un document ayant une portée informative, entaché d’une erreur matérielle.

Il convient toutefois de préciser que nous ne savons pas, à la date de rédaction du présent article, si ce jugement a été frappé d’appel.

En toute hypothèse, cette décision met une nouvelle fois en exergue le fait que les erreurs matérielles contenues dans documents d’information émis dans le cadre d’une assurance de groupe donnent souvent lieu à des litiges.

Afin de limiter les risques découlant de telles erreurs, une bonne pratique est d’insérer, dans ces documents d’information, une clause de réserve renvoyant au règlement de l’assurance de groupe comme seule et unique source de droits à cet égard.

Source : Trib. Trav. Liège (div. Liège), 14 janvier 2022, RG 20/3306/A, inédit.

Caroline Huart
Avocate
Claeys & Engels

Talent development advisor

Partenamut

Gestionnaire de projets HR Analytics

Actris

Responsable Talent Acquisition et Recrutement H/F

Cliniques universitaires Saint-Luc

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