Le Feedback… et ce que nous faisons pour nous en protéger

Carte Blanche

TEXTE: JONATHAN FOX

Vendredi 17h45. Fin d’une semaine chargée. Véronique, jeune cadre énergique, décide d’encore vite donner du feedback à un collaborateur (Jean, 57 ans) sur le retard pris sur un projet en cours. Jean, d’habitude plutôt jovial et collaboratif, se ferme complètement et lui rétorque: « Si les autres avaient fait leur job, j’aurais peut-être pu faire le mien. C’est toujours la même chose dans cette boîte ! » Prise au dépourvu, Véronique clôt l’échange en balbutiant un vague prétexte…

Dans toutes les organisations, on promeut le feedback, on encourage les N+1 à en donner aux collaborateurs ; on demande même aux collègues de se donner du feedback de manière transversale, et pourtant… D’où vient ce contraste entre notre désir impératif d’en donner, et les risques qui nous font craindre de passer à l’acte (comment va-t-il/elle réagir?). Les dangers imaginés se traduisent en : « Il va me demander pour qui je me prends » ; « Elle va se mettre en colère ou se mettre à pleurer » ;  « Il va trouver plein d’excuses ou, pire, invoquer un certificat médical si je persiste, et je ne saurai plus quoi dire ». Notons aussi que des facteurs comme le stress, la fatigue et le surmenage diminuent la réceptivité au feedback et ce, quelle que soit la personnalité de la personne réceptrice.

Homéostasie

Crochet utile par la biologie : on appelle homéostasie l’équilibre constant maintenu dans notre corps par les systèmes sympathiques et para-sympathiques. Tour à tour, ils inhibent ou renforcent certaines fonctions. Ils assurent un état équilibré et réagissent si celui-ci est rompu en produisant par exemple de la sudation. De même, nous avons un thermostat psychique qui surveille constamment l’état de notre « image de soi », surtout dans le regard des autres, et qui corrige toutes les atteintes à celui-ci, en produisant automatiquement des pensées compensatrices, façon : « C’est celui qui dit qui l’est ».

La majorité des personnes ont tendance à systématiquement se surestimer. Raison pour laquelle plus de 80% de conducteurs/trices s’estiment au-dessus de la moyenne. Idem pour l’estimation du QI. Ce mécanisme psychologique de (légère) surestimation est en fait bénéfique car il nous aide à avancer, à évoluer, à oser faire face à l’inconnu, à prendre certains risques modérés. Cependant, lorsqu’il y a tension entre « ce que je crois de moi » et « ce qu’on me dit de moi », l’individu essaie de la réduire à tout prix. Ce phénomène, appelé « réduction de la dissonance cognitive » a été mis en lumière par le chercheur américain Louis Festinger en 1957.

«Soyez un exemple de personne qui demande et accepte le feedback des autres. Cela rendra l’opération d’autant plus facile quand les rôles seront inversés »
JONATHAN FOX, Consultant en Ressources Humaines

Observez votre entourage, voire vous-mêmes, et vous le verrez à l’œuvre quotidiennement, sous plusieurs formes, la principale consistant à externaliser la faute : « Si je n’ai pas pu remettre le projet à temps c’est à cause de : la grève ; l’équipe X qui n’a pas fait son boulot ; la personne Y qui est une incapable ; etc. » Le même mécanisme s’enclenche lorsque je minimise mes erreurs de conduite sur la route. Et que j’exagère celles des autres… On peut aussi réduire l’atteinte à notre « image de soi » en pratiquant l’attaque directe de l’interlocuteur d’où le trop fameux : « Oui, mais toi tu dis ça parce que… » suivi d’un chapelet de raisons hors sujet.  

Notons que si l’équilibre recherché ne se rétablit pas instantanément, les pensées compensatrices peuvent nous poursuivre longtemps après le feedback lui-même. Ne vous êtes-vous jamais réveillé à 3 h du matin en vous disant : « J’aurais dû lui dire que… » ? Enfin, une autre technique observée : la recherche du soutien social et du réconfort auprès d’autres  par un: « Tu te rends compte ! Il m’a dit que…tu trouves ça normal ? »

On le voit ces mécanismes d’équilibrage ou d’homéostasie psychique se déclenchent en permanence, inconsciemment. Ils nous amènent à réfléchir à la question principale à se poser à propos du feedback : comment rendre les mécanismes de défense inutiles ?

La réponse se trouve principalement dans l’entretien de relations riches et authentiques avec les collègues et collaborateurs. Donnez du feedback de façon fréquente mais informelle, remerciez les personnes et créez une atmosphère d’apprentissage au lieu de privilégier le contrôle. Soyez un exemple de personne qui demande et accepte le feedback des autres. Cela rendra l’opération d’autant plus facile quand les rôles seront inversés. La qualité de la relation, telle que perçue par le collaborateur/trice sera le principal garant d’un feedback réussi. Si la personne se sent en « sécurité psychologique » elle ne craindra plus de parler ouvertement et le feedback s’en trouvera grandement simplifié.

Gestionnaire de projets HR Analytics

Actris

Responsable Talent Acquisition et Recrutement H/F

Cliniques universitaires Saint-Luc

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