Les faits concernent un agent contractuel engagé par une Ville depuis le 1er juin 2010. Après avoir exercé différentes fonctions au service des bâtiments, l’agent endossera la fonction de responsable de l’équipe chargé des bâtiments des écoles à partir du mois de mars 2013.
L’agent a connu plusieurs périodes d’incapacité de travail continues durant son occupation :
- Un mois et demi en 2011 ;
- Près de deux mois fin 2012 ;
- Et depuis le 2 juin 2014.
Au moment où il a été informé de la nouvelle prolongation de l’absence de l’agent qui durait déjà depuis 4 mois et demi, le directeur de la Ville a préconisé son licenciement.
L’agent sera finalement licencié moyennant indemnité le 4 novembre 2014, 5 mois après sa dernière période d’incapacité de travail. Le motif énoncé dans le courrier de rupture est le suivant : « le Collège communal a pris connaissance d’un rapport relatif à vos absences. Il a dû constater que le nombre de celles-ci empêchait une organisation du travail garantissant la continuité du service. Bien que la qualité de votre travail ne soit pas en cause, nous regrettons de vous faire savoir qu’il a été décidé de mettre fin à votre contrat de travail à dater de ce jour ».
Devant la Cour du travail, l’agent réclame :
- 15.000 EUR à titre de dommages et intérêts résultant de la perte d’une chance de conserver son emploi en raison de l’absence d’audition préalable ;
- 15.000 EUR à titre de dommages et intérêts pour licenciement abusif ;
- 19.152,73 EUR à titre d’indemnité de protection pour licenciement discriminatoire sur base de son état de santé / handicap.
En première instance, le tribunal du travail a rejeté les demandes du travailleur.
En ce qui concerne la demande fondée sur l’absence d’audition préalable, la Cour estime que l’audition de l’agent ne lui aurait pas permis d’éviter le licenciement, en raison des motifs pour lesquels il a été licencié.
La Cour considère que la fréquence et le volume des absences de l’agent ont posé d’importantes difficultés d’organisation du travail au sein de l’équipe des bâtiments attestées par les pièces déposées par la Ville. En effet :
- Le service des bâtiments faisait l’objet d’une attention particulière en raison d’importantes difficultés constatées au niveau de la hiérarchie intermédiaire dont l’agent faisait partie ;
- Pour cette raison, une réorganisation de l’encadrement des équipes a été décidée dans le cadre de laquelle la responsabilité de l’équipe chargée des écoles a été confiée à l’agent ;
- Depuis 2014, une nouvelle fonction de gestionnaire technico-administratif a été créée au sein du service mais le travailleur désigné pour ce poste n’a pu exercer cette fonction car il a dû remplacer l’agent ;
- Il était donc impossible de mettre en place une structure saine et équilibrée pour la gestion du service des bâtiments.
La continuité du service public exigeait donc de pourvoir définitivement la fonction de l’agent. Dans ce contexte, une audition du travailleur n’aurait pas conduit à une autre décision que celle qui a été prise.
La Cour rejette également la demande de dommages et intérêts pour licenciement abusif. Elle considère que les fréquentes absences de l’agent ont eu un impact sur le fonctionnement du service, en raison des difficultés récurrentes d’organisation qu’elles ont engendrées. Dans ce contexte, la décision de licencier l’agent n’est pas manifestement disproportionnée ou inadéquate par rapport au besoin de continuité du service. Le motif du licenciement est donc valable et la demande rejetée.
La demande d’indemnité de protection pour licenciement discriminatoire sur base de l’état de santé est quant à elle déclarée prescrite par la Cour.
Conclusion
Les absences pour incapacité de travail d’un travailleur constituent un motif légitime de licenciement lorsqu’elles perturbent, de par leur fréquence, le fonctionnement du service auquel le travailleur est affecté. On ne peut que recommander à l’employeur confronté aux absences récurrentes d’un travailleur de se ménager des preuves des problèmes organisationnels concrets engendrés par celles-ci. Ces preuves lui seront utiles lorsqu’il devra par la suite se justifier d’avoir licencié le travailleur en raison de ses incapacités de travail successives.
Source : C.T. Bruxelles, 12 mai 2021, R.G. n° 2018/AB/520