En 1983, les négociateurs de la CCT 38 n’ont sciemment pas demandé de rendre l’article 9 obligatoire, explique Michèle Claus, Premier conseiller auprès du Centre de compétence Emploi & sécurité sociale de la FEB. Ils estimaient en effet qu’une obligation de politesse imposant de répondre à un postulant ne devait pas être sanctionnée par des sanctions pénales. Ce raisonnement reste pertinent. Il y a 30 ans, les postulants posaient leur candidature au moyen d’une lettre de candidature manuscrite, en y joignant un CV. Cela demandait beaucoup de temps et d’énergie. Depuis lors, les techniques de candidature ont fortement évolué. Les candidatures se font à présent au moyen de lettres types, de courriels types, qui peuvent être envoyés à des dizaines de destinataires d’un simple clic de souris. Les postulants posent également de plus en plus souvent leur candidature au moyen de systèmes en réseau (sites web, Linkedin, Facebook, Twitter). Avec le progrès technique, l’état d’esprit de nombre de postulants a lui aussi changé. Ils posent leur candidature de manière large, afin d’atteindre le plus grand nombre possible d’employeurs potentiels. Tout va vite. Les candidats n’attendent pas que l’on réponde à chacun de leurs messages. L’absence de réponse est l’équivalent, pour eux, d’une réponse négative.
En conséquence, le nombre de candidatures par poste vacant et le nombre de candidatures spontanées ont fortement augmenté par rapport à l’année 1983. Certaines grandes entreprises reçoivent jusqu’à 6.000 candidatures par mois. Les petites et grandes entreprises reçoivent facilement des dizaines de candidatures pour un poste vacant, parfois de la part de candidats qui répondent quelque peu aux exigences, souvent de la part de candidats qui ne satisfont pas du tout aux conditions. Les employeurs fournissent d’importants efforts afin de répondre à toutes ces candidatures, mais il reste déraisonnable d’imposer une obligation de résultat à cet égard, indique la FEB. Il serait disproportionné de sanctionner les imprécisions ou oublis par des sanctions pénales (ou, dans des propositions alternatives, des sanctions civiles), et, de plus, cela dissuaderait les employeurs potentiels de publier largement leurs offres d’emploi.
Une obligation de motivation pour chaque candidature non retenue est totalement irréalisable pour les entreprises. Inventorier les insuffisances des candidats, sans blesser inutilement et sans démotiver, est un exercice délicat et chronophage. Il est impossible de s’y livrer pour chaque candidature non retenue. On peut aussi se demander si de telles mesures encourageront les entreprises à recruter et à explorer des canaux de recrutement plus larges? Au contraire, elles favoriseront le recrutement dans les réseaux connus, au détriment des groupes à risques.
« Les organisations d’employeurs continueront à encourager et à soutenir les entreprises afin qu’elles apportent une réponse à tous les postulants, conclut la FEB. Mais sanctionner les oublis et les imprécisions de certaines entreprises par des sanctions pénales est disproportionné. »