Un travailleur est engagé dans une fonction d’employé polyvalent. Son contrat précise qu’il exercera principalement ses missions chez un client de son employeur situé à Bruxelles mais qu’il pourra également être amené à effectuer des prestations pour deux autres sociétés situées à Wavre et à Tervuren. Le contrat avec le client bruxellois étant arrivé à échéance, l’employeur met fin au contrat de travail moyennant un délai de préavis à prester, préavis qui devait être presté au siège de l’employeur, à Wavre.
Le travailleur conteste immédiatement cette modification de lieu de travail en indiquant qu’il ne dispose pas de véhicule privé. Il demande un aménagement de ses conditions de travail : octroi d’une voiture de société, aménagement de ses horaires de travail, télétravail,… Lors d’une réunion, l’employeur lui rappelle les règles applicables en matière d’aménagement de l’horaire de travail mais indique qu’il ne peut accepter les demandes relatives à l’octroi d’une voiture de société et à du télétravail exclusif. Par courrier recommandé envoyé le surlendemain de la réunion, le travailleur constate un acte équipollent à rupture et réclame une indemnité compensatoire de préavis. Suite au refus de l’employeur, le travailleur introduit une procédure en justice en réclamant le paiement de l’indemnité compensatoire de préavis. L’employeur soutient que le travailleur est à l’origine de la rupture et réclame le paiement d’une indemnité de contre-préavis.
Rappel des principes
Le tribunal rappelle les principes de base qui se dégagent de la jurisprudence en matière d’acte équipollent à rupture résultant d’une modification importante d’un élément essentiel du contrat de travail. Pour qu’elle puisse être considérée comme un acte équipollent à rupture, la modification du contrat de travail doit être à la fois unilatérale, importante et porter sur un élément essentiel et non sur des conditions « accessoires ». Il rappelle également qu’il convient d’apprécier l’ensemble des circonstances de fait et d’avoir égard « à l’intérêt du travailleur ainsi qu’à l’intérêt économique de l’entreprise ».
En ce qui concerne plus particulièrement le lieu d’exécution du contrat de travail, le tribunal rappelle qu’il s’agit en principe d’un élément essentiel « sauf s’il peut être déduit du contrat, de la nature de l’emploi, ou des fonctions exercées que les parties ne l’ont pas considéré comme tel ». Il précise également qu’il peut être tenu compte des moyens de communication pour déterminer l’importance de l’atteinte à la condition contractuelle du lieu de travail et que « le travailleur a donc l’obligation d’accepter une modification raisonnable de son lieu de travail ».
Décision du tribunal
Le tribunal tient compte du fait que le contrat de travail prévoit la possibilité pour le travailleur d’effectuer des prestations en d’autres lieux que son lieu d’occupation principal. Il considère que, dans la mesure où le travailleur a accepté d’effectuer des prestations dans d’autres localisations, le fait de lui demander d’effectuer ses prestations à Wavre ne constitue pas une modification des conditions de travail qui ont été convenues.
Au delà de ce constat, le tribunal précise qu’il s’agit en tout état de cause d’un changement mineur au vu de la distance de 29 km qui sépare les deux lieux et des moyens de transport existants. En outre, il souligne qu’il ne s’agit pas d’une décision arbitraire mais d’un aménagement des conditions de travail qui a été imposé aux parties à l’échéance du contrat conclu avec le client situé à Bruxelles.
Le tribunal a par conséquent déclaré le travailleur responsable de la fin du contrat de travail en dénonçant à tort un acte équipollent à rupture dans le chef de son employeur et l’a condamné au paiement d’une indemnité de rupture.
Noémi Tilmanne
Avocat Claeys & Engels
Trib. trav. Brabant wallon, division Wavre, 22 août 2017